Team METISS-JBB #45
Prototype moto d'endurance MetisS à TSS-2 (concept JBB)

24H du Mans Motos 2024
(Championnat du Monde d'Endurance Moto FIM - catégorie Experimental)
Fin de la Révolution MetisS à moteur Suzuki...
 

 Ecrit par webmestre │24 Avril 2024 | renna.fr

C’était enfin l’heure de la reprise du Championnat du Monde d’Endurance Motos FIM 2024 le week-end dernier sur le circuit Bugatti au Mans avec l’épreuve des mythiques 24H Motos.
Un début de saison 15 jours plus tôt, lors des Pré-24H Motos et de la premère manche du Championnat de France Superbike (FSBK) sur ce même tracé augurait un excellent présage pour cette 47e édition des 24H Motos 2024.

Pour la première fois de l’histoire des 24H Motos, était organisé une parade s’élaborant au travers d’un parcours allant du circuit jusqu’au centre-ville du Mans pour s’établir place des Jacobins, non loin de la demeure de notre cher et regretté Jean-Bertrand Bruneau (concept JBB). Il y avait foule pour voir de près les machines et faire signer des autographes aux pilotes participant à la 47e édition des 24H Motos.


24H du Mans Motos 2024 | Parade en direction du centre ville 

Ce fût l’occasion d’immortaliser par une photo, le proto MetisS et la petite équipe METISS en compagnie de la femme de Jean-Bertrand (Thérèse Bruneau) au pied de la grande bâtisse mancelle où du deuxième étage de celle-ci Jean-Bertrand concevait toutes ses inventions et brevets.


La Team METISS rend hommage à Thérèse Bruneau, la femme de Jean-Bertrand Bruneau, au pied de leur demeure durant la parade des 24H Motos 2024


Les festivités terminées, l'épreuve proprement dite débuta par les qualifications du Jeudi où tout s’annonçait pour le mieux tant au point de vu des réglages, pneumatiques et météo puisque L. Rizza établissait un nouveau record personnel sur une MetisS en 1’38’’493 lors des essais libres malgré la fraicheur matinale.
L’après-midi, fût enfin venue le moment de la première séance qualificative (Q1) où d’entrée, le premier pilote G. Pons, commença la valse des records METISS qui tombèrent les uns après les autres avec un nouveau record personnel, très symbolique, en passant sous la barre des 1’38’’ avec un nouveau record d’une MetisS sur le tracé du Bugatti en 1’37’’942 (P17 de sa séance). Mais le jeune pilote M. Schmidt qui n’avait découvert le prototype MetisS et le tracé du circuit Bugatti que 15 jours auparavant, lors des Pré-24H Motos, continua sur la lancée de la bonne alchimie des réglages et pneumatiques trouvés pour ne pas s’en laisser compter et réaliser son record personnel de la piste en plus de celui d’une MetisS sur le Bugatti, détenu quelques minutes auparavant par G. Pons dans sa séance qualificative, en descendant ce record en 1’37’’597, le classant par la même en 10e position et premier StockSport de sa session qualificative. L. Rizza, pilote pourtant le plus rapide, n’eut pas la chance quant à lui de mettre tout le monde d’accord et d’empocher le trophée DELTA NEO (trophée organisé par un de nos partenaires récompensant le pilote décrochant le meilleur temps de l'équipe) qui lui tendait les mains suite à sa chute à 8’ du terme de sa séance qualificative et resta avec un chrono de 1’38’’603 (P17). J. Akroyd, 4e pilote de l’équipe (pilote remplaçant) battra également son record personnel sur le Bugatti en un 1’39’’336 (P13).
Le vendredi matin, les conditions climatiques d’une piste trop froide, ne permis pas d’améliorer les temps au tour lors de la Q2, sauf pour L. Rizza, coupé dans son run par une chute mettant un terme prématuré à sa Q1 prometteuse du Jeudi après-midi, en un 1’38’’401 établissant tout de même un nouveau record personnel sur une MetisS au Mans.
Soit au final de ces qualifications, un temps moyenné (temps des 2 meilleurs pilotes de l’équipe) de 1’37’’769, soit 1’’5 plus rapide que l’ancien record METISS et plaçant le prototype MetisS en 14e position sur l’épi de départ (1re EXP) avec là encore un record à la clef puisque la meilleure position d’un départ de 24H Motos était une 21e place.


Ces sublimes performances et cette belle qualification a valu à la Team METISS, encore plus qu’à l’accoutumée, une importante présence médiatique et couverture télévisuelle.

Le jour de course tant attendu, après cette pluie de records, pour finaliser et mettre en lumière tous les progrès accomplis autour du prototype MetisS au châssis et construction optimisés malgré un moteur et une électronique Suzuki obsolète, était venu en ce Samedi 20 Avril et en cette heure sonnant les 15 pour le départ de cette 47e édition sous un soleil lumineux mais froid, laissant une piste à la température basse et piégeuse.
G. Pons, habitué des départs en épi des courses d’Endurance fût désigné pour prendre celui-ci, malgré le meilleur temps de M. Schmidt étant inexpérimenté pour sa première participation à une course d’Endurance.

Malgré cela, au compte à rebours des 15H du départ, l’expérimenté G. Pons ne put démarrer la moto et resta scotché sur l’épi de départ. Le temps de réinitialiser la machine, la course était lancée et de sa 14e place, glissa en 36e position pour passer le premier tour 35e.


Sur la gauche, G. Pons est encore à l'arrêt en épi alors que la meute est lancée.

Une remontée s’en suivit, tour après tour, se positionnant 29e sur une piste restant malgré tout très froide et un « Hide Side » à la ré-accélération au « garage vert » l’entraîna dans une chute aussi spectaculaire que violente. Heureusement il put se relever et revenir moteur allumé au stand. Mais à cet instant intense et dense de ce début de course, et malgré avoir perdu que 9’, G. Pons reparti au guidon en 43e position.

Quand une heure plus tard L. Rizza pris son relais, celui-ci se fît piéger également dans cette remontée imposée dès le départ de l’épreuve, par la fraicheur, pour ne pas dire la froideur de la piste et chuta à son tour. A nouveau, 10’ de perdues avant que L. Rizza puisse repartir pour s’arrêter un tour plus tard car un problème sur la moto subsistait, infligeant 12’ supplémentaires d’arrêt au stand pour résoudre le problème. Soit 30’ au stand alors que la course n’avait débuté que depuis 1h30 !!!

C’est donc en 44e place que M. Schmidt pris son tout premier relais pour sa première participation à une course d’Endurance. Mais ce jeune pilote, tel un vieux briscard de l’Endurance enchaîna les tours en toute confiance pour progressivement faire tomber les chronos au cours de son relais et tourner en 1’39’’058 en accrochant la 42e position à 17h40 (3e heure de course).
Les relais s’enchaînèrent ensuite pour remonter progressivement en espérant discrètement que les autres équipes subissent leurs lots de malchances également sur cette froide piste très piégeuse.
A minuit, la MetisS remontait 37e. Mais les stigmates des chutes apparaissaient peu à peu sur la machine, et un quart d’heure plus tard un arrêt au stand s’imposait pour changer le silencieux qui chantait faux et dont le chef d’orchestre, autorité de l’épreuve, obligeait celui-ci afin de poursuivre la course.
Une heure plus tard, alors que dans cette nuit glaciale imposant des rythmes moins soutenus, M. Schmidt au guidon de la MetisS, roulant dans le TOP 10 de la feuille des temps en course, claqua un 1’39’’055, améliorant le meilleur temps du team METISS en course, dont celle-ci remontait à la 34e position. Mais quelques minutes plus tard… panne d’essence, M. Schmidt connu alors dès sa première épreuve les « joies » de la poussette et de l’extrême effort qu’il s’en suit pour ramener la moto au stand. 10’ de perdues à nouveau avant que G. Pons reparte bille en tête.

À mi-course (03h00 du matin) L. Rizza, l’épaule meurtrie par les chutes, sauta son relais pour récupérer et donner plus d'amplitude au repos et au soins prodigués par l’ostéo pour finir la course à trois pilotes dans de bonnes conditions. M. Schmidt anticipe alors son relais pour faire remonter la MetisS en 33e position sous le regard impressionné d'une jolie Lune rousse.
L’ostéo ayant fait des miracles, L. Rizza en compétiteur, reparti de plus belle avec ses coéquipiers qui eux aussi commençaient à avoir les stigmates de la longueur et froideur polaire de la nuit d’une course d’Endurance en cette 47e édition des 24H Motos au Mans.
Au petit matin, alors que le technicien du manufacturier Pirelli préconise de monter les pressions à chaque relais vu les baisses de températures successives de la piste, la Team METISS aux pilotes remplis d’abnégation, parvient à rentrer dans le TOP-20 à 7h00 du matin au soleil levant. Se faisant, malgré le jour venant, et soleil présent, les températures (air/sol) restent toujours aussi frileuses sans aucun espoir de les voir au firmament du thermomètre, M. Schmidt allume le feu sur la piste dans le secteur 1 et 2 du tracé Bugatti pour établir le nouveau record en course de la MetisS en 1’38’’ 858.

Un peu avant 11H (20e heure de course) la MetisS se rapproche du TOP15 en 16e position. Mais une heure plus tard, L. Rizza au freinage du virage du raccordement chute violemment de nouveau, suite à la rupture d’un demi-guidon (stigmate des précédentes chutes ?).

11’ de perdues. G. Pons repartira en 21e position, malgré une main gauche douloureuse d’ampoules.
Le dernier relais sera l’apanage du prometteur et jeune pilote allemand M. Schmidt pour finalement passer la ligne d’arrivée en 17e position (1re EXP) le Dimanche 21 Avril à 15h, après 24H d’une course folle et âpre pour les pilotes, machine, mécanos et ostéo, dont 20 équipages sur 48 ne finiront pas cette 47e édition des 24H Motos 2024.


M. Schmidt termine l'épreuve pour la Team METISS-JBB en 17e postion avec le sticker de retraité du prototype MetisS à moteur Suzuki.
 
 
 
 

Pour la dernière course de cette MetisS à moteur Suzuki, le panache fût bien au rendez-vous, honorant son concepteur, ses réalisateurs, ses développeurs, ses pilotes, dont toute l’équipe METISS fût entourée toute la semaine par ses nombreux partenaires, passionnés et fans très curieux de la course et de notre technologie de concept JBB où même le grand Masakazu Fujii (team Manager du FCC TSR Honda France #5, Team Championne du Monde d’Endurance FIM EWC 2017-2018) est venu avant la course admirer notre prototype et discuter avec l’équipe technique de ses process et s’enquérir de l’avancement de notre prochain prototype à moteur Honda.


Honorant son passage et sa sagesse, nous finirons ce résumé par ses mots :
« Le MotoGP, que j’adore, est un sprint de 100 mètres. Une course d’endurance est un marathon et une fois que vous atteignez l’arrivée, vous ressentez un sentiment unique d’accomplissement » (M. Masakazu Fujii).

La Team METISS partage cet accomplissement avec tous ses partenaires qui sont l'un des murs porteurs de l’équipe, et avec tous ses nombreux admirateurs curieux et enthousiastes boostant encore plus sa motivation à développer et perdurer.
 

 
 
 
- MOTS DES PILOTES, APRÈS COURSE -
 

Gabriel Pons
"Clap de fin sur les 24H Motos avec une 17e place au classement général, enlevée à l’arrachée après 24 heures de lutte contre nous-mêmes.
Relégués en fond de classement à la 48e place après des chutes en début de course, dont une dont je porte l’entière responsabilité, on a cravaché tout le long pour apporter le meilleur résultat possible au Team METISS.
Évidemment le résultat final est une nouvelle fois décevant et en deçà de nos attentes, mais on se console avec la satisfaction de n’avoir rien lâché !
Vous allez me dire : c’est con, le mec il se flanque par terre au bout de 11 minutes d’une course de 24 heures ! Et je suis on ne peut plus d’accord.
Merci à tous ceux qui ont suivi, et merci à tous ceux qui m’ont communiqué leur soutien. Ça met toujours du baume au cœur quand il faut monter sur la moto à 6h du mat’ par 2 degrés, pour un énième relais !"

 
Ludovic Rizza
"Fin de ces 24h du Mans !
Nous finissons en 17e position après avoir tout simplement été dernier après 1h de course, une belle remontée pour laquelle je suis content mais avec une belle pointe d'amertume également.
Littéralement coincé et mal en point après une chute assez lourde au chemin au bœuf lors de mon premier relais, il m'a fallu quelques relais pour retrouver des couleurs, puis reprendre un bon rythme pendant la nuit, nous avions réussi à franchir les aléas de la nuit et du plaisir de piloter sous 2 degrés pour nous retrouver à 20h de course à proximité du top 15 et en capacité de l'intégrer.
Malheureusement, comme tout est contre nous pour cette course… Le tube de demi guidon droit va casser lors de l'entame de mon 7e relais à l'approche du virage du raccordement, je fais un soleil et je me retrouve projeté assez violemment au sol et sonné, suite à ça je fais au mieux pour pousser la moto et la ramener au plus vite, s'en suivra 3h de fin de course vraiment difficile pour nous et toute l'équipe épuisé par les péripéties permanentes, nous finirons tout de même à une méritante 17e position, notre rythme et notre constante sans tous ces problèmes aurait mérité et permis de faire un bien meilleur résultat pour la dernière course de la MetisS à moteur Suzuki, vivement le prochain projet !
Merci à tous pour les encouragements et le public venu en masse nous féliciter et acclamer, merci à l'équipage METISS et mes helpeurs Lisa et François qui m'ont remis d'aplomb ainsi que de Cyril notre super ostéo !

 
Max Schmidt
"Quelle course folle. 24 heures de course. J'ai vécu tout ce que je peux imaginer se produire pendant la course. Deux chutes de mes coéquipiers dans la première heure et demie. Moi-même poussant la moto aux stands à 2h30 du matin à cause d'un réservoir de carburant vide. Nouvelle chute vers la fin de la course à cause d'un guidon cassé. Et et et...
Mais au final, nous avons non seulement terminé la course, mais nous avons également réussi à terminer 17e.
Je ne peux pas vraiment décrire avec des mots à quel point cette course a été incroyable. Merci à l'équipe METISS et Ludovic Rizza, Gabriel Pons d'avoir tout donné et aussi de m'avoir poussé dans mes derniers retranchements ! Et bien sûr à tous ceux qui me/nous soutiennent pendant la course, merci !"

 
Joe Akroyd
"Eh bien, quelle semaine… un immense merci à la team METISS pour la semaine dernière. Quelle équipe géniale et quel groupe de personnes. J'étais le pilote de réserve pour eux, mais j'ai quand même réussi à battre mon record au Mans de 3 secondes, donc j'en étais content. Ils ont eu une course très difficile mais ont continué à pousser pour terminer 17e au classement général. Méga boulot de G. Pons, L. Rizza et au rookie de l'endurance M. Schmidt, méga boulot Max, un acte de classe.
Je suis toujours époustouflé par ce qu'un petit groupe de Français incroyables est capable de réaliser avec cette moto."

 
 

 
 
 
- A RETENIR -
 


• Nouveaux records personnels des pilotes sur le tracé Bugatti : Joe Akroyd en 1'39''336, Gabriel Pons en 1'37''942, Max Schmidt en 1'37''597.
• Nouveau record personnel sur une MetisS sur le tracé Bugatti de Ludovic Rizza en 1'38''401.
• Nouveau record d'une MetisS sur le tracé Bugatti en 1'37''597 (Max Schmidt, trophée DELTA NEO).
• Meilleur temps moyenné lors des qualifications des 24H du Mans Motos en 1'37''769 (M. Schmidt 1'37''597 - G. Pons 1'37''942)
• Meilleure place qualifiative d'une MetisS et d'une machine à Concept JBB dans l'épreuve des 24H du Mans Motos en partant de la 14e position sur l'épi de départ.
• Meilleur temps en course pour une MetisS en 1'38''858 réalisé par le pilote M. Schmidt dans la 18e heure de course.
• Victoire en catégorie EXPERIMENTAL
 


 
 
 
 

- par GABRIEL PONS -
(pilote METISS)

Me voilà rentré chez moi à Toulouse, une bonne nuit de sommeil après plus de 36h sans dormir. Un terrible goût d'inachevé me pousse à déjà écrire le bilan de cette semaine des 24h du Mans 2023 avec le Team METISS.
Nous nous sommes alignés à cette 46e édition animés par un profond désir de revanche après les échecs des éditions 2021 et 2022 lors desquelles nous avions terminé les courses très loin au classement suite à de lourdes chutes, et ce malgré une très bonne vitesse en piste et lors des ravitaillements. Dans cette optique, le courageux Team METISS a travaillé d'arrache-pied depuis des mois afin de réunir une bonne fois pour toutes une moto et des pilotes performants, ainsi que le budget nécessaire à poursuivre nos ambitions. Sur les plans sportifs et techniques on sait parfaitement que le potentiel est là pour emmener l'incroyable METISS MS22 dans le Top-10 scratch à l'issue des deux tours d'horloge.
Notre saison a d'ailleurs superbement démarré (si l'on occulte le fiasco des deux jours de winter tests au Vigeant), avec de superbes performances au FSBK du Mans, lors desquelles nous avons réussi à parfaitement adapter la moto aux pneus Pirelli que nous utilisons cette année. Lancés dans cette bonne dynamique, nous avons réalisé d'excellents essais Pré-Mans et une semaine précédent la course sans-faute, récompensée par la 18e place scratch des qualifications parmi un plateau de très haut niveau et riche de 55 équipages internationaux. Cela a d'ailleurs été la meilleure place en qualification de l'histoire du Team METISS aux 24h du Mans !
Pour la première fois de ma carrière au sein du Team METISS et grâce à cette semaine exempte de problèmes et autres contre-temps, nous abordons la course en pleine possession de nos moyens. L'équipe a eu tout le temps nécessaire de préparer la moto de course aux petits oignons et nous avons également eu du temps pour préparer notre course du mieux possible en termes de planning et de briefing. Nous validons d'ailleurs la moto de course samedi matin au warm-up avec un très bon feeling général et avec la joie de retrouver un moteur "frais" et donc plus performant que celui que nous utilisions jusque là.
C'est donc baigné d'une REELLE sérénité que j'aborde cette course, avec l'indéfectible sentiment que l'heure de la concrétisation à sonné. Brutal changement d'ambiance lorsque la moto tombe en panne électrique à la sortie des esses bleus alors que je l'emmène sur la grille de départ... J'arrive malgré tout à rallier la grille sur l'élan et Antonin le plus jeune mécanicien de l'équipe me pousse de toutes ses forces jusqu'au stand. Le problème est rapidement décelé et réparé : c'est le coupe-contact (pourtant monté neuf) qui ne fonctionne plus. Nous pouvons heureusement rejoindre notre 18e position sur la grille et prendre le départ sans être pénalisés.
Quinze heures, départ ! Je prend un superbe envol mais Kevin Manfredi sur la Yamaha 777 se satellise sous mes roues, ce qui me fait perdre énormément de terrain. Passé un premier tour un peu anarchique, je prends mon rythme mais suis immédiatement en proie à de gros problèmes de freins, avec une garde au levier qui n'arrête pas de varier. Je décide d'adapter mon rythme en conséquence et d'essayer de rester en piste jusqu'au bout du relais, afin de pouvoir informer l'équipe, puis de pouvoir anticiper et planifier la réparation. J'informe évidemment Camille qui prend mon relais et assurera "l'intérim de la survie" en piste. Le problème sera résolu pendant le 3e relais assuré par Hikari, nous perdons 8 minutes dans l'opération soit 5 tours et sommes donc relégués en fond de classement. Les espoirs de Top-10 se sont déjà envolés... La fautive dans l'histoire était la molette de réglage de garde déportée elle-même (pourtant également montée neuve) dont le serrage insuffisant n'empêchait pas le doigt de rattrapage de garde de tourner lors d'efforts importants au levier. J'ai vraiment cru rêver quand j'ai su ça, comment être plus poissards ?
Ce problème désormais résolu, nous sortons la grosse attaque afin de remonter et pourquoi pas sauver un top-15. Les conditions en piste sont particulièrement difficiles, il fait très froid et il y a beaucoup de vent ce qui entraîne de nombreuses chutes. A la force du poignet nous réintégrons le top-30 en fin d'après-midi. Hélas, mille fois hélas mon équipier Hikari part à la faute à la sortie du chemin aux boeufs dans des circonstances étranges et encore inexpliquées. La moto est suffisamment endommagée pour ne plus être roulante et il est obligé de recourir au camion d'assistance pour ramener la moto au box. Les mécanos réussissent à la réparer très rapidement, mais cette nouvelle désillusion nous a fait perdre 30 minutes : retour en queue de peloton, aux alentours de la 50e place.
La nuit tombe et le froid avec, il fait moins de 5 degrés mais nous continuons d'attaquer à 110%. De mon côté je ne lâche également rien, résolu à montrer s'il était encore nécessaire les capacités de la MetisS MS22 en piste. Il est d'ailleurs d'autant plus rageant de constater notre niveau de performance : nous sommes régulièrement parmi les 10 plus rapides en piste... Je réalise tout au long de la nuit de très bons chronos, réguliers en 1.39 / 1.40.
Au guidon, je prend un plaisir fou et la fatigue ne me fait pas (encore) souffrir. La belle MetisS est fidèle à elle-même : incroyable d'efficacité, nous la faisons virevolter avec bonheur au milieu du gratin mondial de l'endurance. Le feedback, la constance et le grip des pneus Pirelli fait merveille, le feeling des trois pilotes est très bon. L'équipe reste 100% mobilisée et nous gratifie de ravitaillements rapides et efficaces. Au lever du jour, la brume envahit le circuit et nous sommes toujours aussi rapides : des tréfonds du classement, nous sommes revenus à la 22e place !
Et encore une fois : "malheureusement"... Une fuite d'huile dont nous n'arrivons pas à déterminer l'origine se déclare aux alentours de 8h du matin. La fuite empire jusqu'à ce que ce ne soit plus raisonnable de continuer à rouler, autant pour nous que pour nos concurrents. Nous rentrons la moto au box afin de démonter ce qu'il faudra pour trouver l'origine de la fuite. Quelques minutes plus tard, le verdict tombe : le carter moteur central inférieur est fendu au niveau de l'alternateur. On tente une réparation à la soudure à froid en vain, et la mort dans l'âme nous signons l'abandon un peu avant 11h du matin...
Mon dégoût est tel que j'en ai les larmes au yeux, et ça c'est une première pour moi. Je reste donc quelques minutes au lit pour digérer un peu avant de descendre au box voir l'équipe (j'en ai d'ailleurs toujours la gorge serrée en rédigeant ces lignes)... quel PUTAIN de dégoût ! Au box, l'équipe est fidèle à sa ligne de conduite : personne n'a arrêté de bosser et le box est déjà en cours de rangement.
Aujourd'hui je me sens démuni. J'ai la conviction que la MetisS MS22 est la meilleure moto privée du plateau vu les performances qu'elle nous permet de faire et j'ai aussi la certitude que l'équipe de ravitaillement est à un excellent niveau. Jusqu'à samedi 15h j'avais l'absolue certitude que cette fois on avait tout bien fait, que le niveau de préparation de la moto et de l'équipe était le meilleur que l'on puisse avoir et malgré tout nous avons une fois de plus souffert de problèmes de fiabilité inédits auxquels on ne peut pas faire grand chose.
Je ne vois que difficilement ce qui pourrait être fait de plus à l'heure actuelle, à l'exception de quelques détails comme faire faire plus de kilomètres à la moto de course avant la course pour assurer un peu plus le "débuggage" ce qui est évidemment à double-tranchant puisqu'on veut toujours garder la moto de course la plus "neuve" possible. Incontestablement le manque de budget est un facteur aggravant à tout cela, un poil plus de capacités financières permettrait de faire gagner du temps à l'équipe et d'avoir une infrastructure et des moyens techniques de meilleure qualité.
Nous les pilotes, on a la partie facile : on se fait plaisir sur la moto et la partie difficile de notre job ne dure que 24h. Pour l'équipe cet échec est l'anéantissement de plusieurs mois de travail acharné lors desquels ils ont conçu, fabriqué de toutes pièces et développé une moto prototype unique au monde, en plus de tout le reste des travaux nécessaires à aligner ce projet fou sur une course d'endurance de niveau international. Au final, si je suis autant déçu c'est aussi parce que je le suis pour eux, cette bande de bénévoles taiseux qui bossent non-stop à la conduite de ce si fantastique projet sans jamais récolter les lauriers qu'ils méritent. A ce stade, "passionnés" n'est pas un terme assez fort vous qualifier les gars, franchement bravo pour tout ce que vous faites.
Et la suite alors ? Je n'en sais rien, on va digérer tout ça et se recontacter une fois la déception passée. Je vais juste vous retranscrire tels quels les derniers mots de Manu le Team Manager à mon encontre au moment de se dire au revoir : "heureusement qu'on a pas gagné aujourd'hui, comme ça on est obligés de revenir pour réessayer". Dire ça ce dimanche à 15h c'est à la fois fou, mais aussi typique du "Collectif Metissé" et c'est aussi pour ça qu'on les aime : "Une Moto et des Hommes"...

- PHOTOS -
( crédit : Team METISS © Pierre Clément © Michel Picard )

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